mercredi 17 janvier 2007

Un article de Sebas pour le Journal du Pays Basque du mois de Novembre

Sébastien BEDOURET / Responsable de Txalaparta Irratia
Qu'est-ce qu'ils veulent ?
Mardi dernier, l’émission de Txalaparta Irratia a commencé sur les paroles de Beltzane Obanos, prisonnière politique basque libérée la veille, quelques heures seulement après la mort de son père. Elle s’est adressée à ses camarades resté(e)s derrière les barreaux, calmement, mais on pouvait entendre dans sa voix la tonalité du vertige. Car perdre son père est un moment douloureux, violent, d’autant plus violent lorsque la nouvelle nous parvient alors que nous sommes même provisoirement dans l’impossibilité de se consoler de la présence de nos proches. Pour elle, il fallait doubler ce déchirement d’un autre, celui de laisser ses amis dans l’enfer carcéral. Où est passée la joie de recouvrer une liberté, aussi relative soit-elle ?
Quelle journée étrange. A l’instant où j’écris ces mots, dans les locaux de la radio, je viens de passer un homme à l’antenne et nous écoutons, en direct, un Ongi Etorri qui a lieu, quelque part en Euskal Herria. Derrière lui, les gens chantentŠ Eusko gudariak gara...
Et cet après-midi, il y a quelques heures, nous apprenions tous qu’Iñaki de Juana reprenait sa grève de la faim.
Il y a des jours comme ça, des périodes, où notre tête semble se perdre dans les méandres d’événements contradictoires les uns avec les autres et qui, au final, donnent le sentiment de ne plus rien vouloir dire du tout. Nos réflexions se perdent dans les méandres d’informations qui s’entrechoquent, se mutilent de façon réciproque. C’est vrai, qu’est-ce que c’est que cette période ? Qu’est-ce que c’est que ce moment ?
Tout ce que l’on sait, tout ce que des centaines de milliers de Basques ont pu "vérifier", c’est qu’il y a un cessez-le-feu... qu’une des parties du conflit est en cessez-le-feu. C’est tout. A part ça, rien n’a changé. Tout est exactement comme avant ce 22 mars où ETA annonçait son initiative et où tout devenait possible. Attention ! Tout devenait possible, parce que tout le monde sait qu’ETA n’annonce pas de trêve pour faire plaisir, mais uniquement lorsqu’elle estime que les conditions sont réunies pour que cela ait un sens et une portée. Tout devenait possible, parce que voir ETA déclarer un cessez-le-feu signifiait que, d’une façon ou d’une autre, elle savait que Madrid était disposé à faire quelque chose.
Et c’est vrai, Madrid était disposé à faire quelque chose. L’intervention de Zapatero au Congrès en a été la preuve. Mais après ? Si c’est tout ce qu’il faut faire, pas de problème ! Moi aussi, je peux t’en faire des discours. Je peux t’en écrire, des pages entières de belles paroles. Mais ça ne veut rien dire.
Aujourd’hui, les choses sont simples : Qui a fait un pas pour la paix ? ETA. Qui n’a rien changé ? Madrid et Paris. Qui respecte sa parole ? ETA. Qui n’a pas encore tenu parole? Madrid et Paris. Qui a suspendu ses actions armées ? ETA. Qui les maintient ? Madrid et Paris.
On dit, tous les jours, que Madrid et Paris continuent sur le chemin de la répression. Mais à force de dire les choses, on finit par ne plus se rendre compte de l’importance de leur contenuŠ ça devient mécanique. Mais attardons-nous un instant sur ce constat que personne ne peut contester : depuis sept mois qu’ETA est entrée dans un cessez-le-feu permanent, depuis tant de mois qu’elle a fermé le front de ses actions contre les représentants des partis politiques espagnols, rien, absolument rien, n’a été fait par les Etats espagnol et français. Il faut lire et relire cette phrase, jusqu’à mesurer à quel point cette situation n’est non seulement pas supportable mais, surtout, n’est pas acceptable. Quel Peuple peut accepter cela ? Pendant combien de temps encore ?
Dans le contexte actuel, plus que jamais, chaque interpellation est un crime contre la paix.
Chaque contrôle d’identité à l’entrée ou à la sortie d’une manifestation est un crime contre la paix. Chaque jour qui passe et qui voit être maintenu l’apartheid politique en Euskal Herria est un crime contre la paix.
Chaque discours sans lendemain est un crime contre la paix.
Et tout Etat, aussi puissant soit-il, finit par répondre de ses crimes. Rien n’est encore fixé. L’Histoire n’est pas terminée. L’Espagne et la France, telles que nous les connaissons, ne sont pas vieilles à l’échelle de l’Humanité. Et elles mourront jeunes, à l’échelle de l’Humanité. C’est non seulement certain, mais c’est surtout inéluctable.
Certaines nouvelles sont attendues avec impatience. D’autres non. Je veux parler maintenant de celles qui sont attendues. Madrid et Paris vont-ils enfin avoir le courage de dire au Peuple basque ce qu’ils veulent ? Que nous sachions si, oui ou non, nous avons raison d’espérer. Parce que, dans la situation actuelle, c’est vers ces capitales que nos yeux sont tournés. C’est leur geste à elles que nous attendons, et pas celui de qui que ce soit d’autre. Changement de politique carcérale ? La réponse doit venir des deux Etats. Arrêt de la répression ? La réponse doit venir des deux Etats. Reconnaissance des droits du Peuple basque ? La réponse doit venir des deux Etats. Légalisation de Batasuna ? La réponse doit venir de l’Etat espagnol.
Non, nous ne rêvons pas. Les seuls qui n’ont rien fait sont bien les Etats espagnol et français et leurs représentants. Alors aujourd’hui, clairement, c’est à eux de faire un effort, et à personne d’autre.

1 commentaire:

Flieflodderke a dit…

Bonjour,

J'aimerai vous souhaiter, à tous et en particulier à Sébas, beaucoup de courage!
Mais je voudrais,aussi, vous signaler que vous avez mis un lien vers mon Blog (pas de problème!) en écrivant "Blog de Peio Serbielle"... Ce qui pourrait faire croire que Peio Serbielle est derrière les textes et contenu de ce blog. Afin d'éviter tout malentendu, j'aimerai vous demander de rectifier.
Un grand merci

Ghislaine